[Cinéma] Le film de la semaine #25
Le film de la semaine
Pour cette nouvelle semaine, un dépressif explique la vie à son ami cadavre et la redécouvre lui-même... Mais trêve de bavardage, place au film de cette semaine, nous parlerons donc de ...
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Swiss Army Man
Année : 2016 - Pays : USA / Suède - Durée : 97 mn - Réalisation et scénario : Dan Kwan, Daniel Scheinert - Casting : Paul Dano, Daniel Radcliffe, Mary Elizabeth Winstead, Antonia Ribero
Hank, naufragé solitaire, tente de mettre fin à ses jours sur sa plage. C'est alors qu'un cadavre s'échoue sur le sable. A première vue bien mort, le cadavre semble pourtant doté de curieux pouvoirs et ranime chez Hank son envie de vivre.
Ce film est une plaie à critiquer. De manière assez positive, oscillant entre le génie et le film débile, il est difficile d'en parler de manière claire parce que déjà dans ma tête c'est pas vraiment tranché. Mais je pense qu'il faut avoir entendu parler de cet OVNI cinématographique, et même le voir mais ça c'est vous qui déciderez, alors je vais essayer de vous en parler. Sans trop en dire, sans être trop vague, sans vous dire que le scénario repose sur une grosse blague de prout. O_o Oups, je l'ai dit. En réalité ce film est extrêmement perturbant, parce qu'il associe une sorte de beauté touchante et magique à un humour très "pipi-caca". Et dans nos cerveaux d'adultes, ça ne va pas ensemble. Mais les Daniels ne s'arrêtent pas à ce genre de détails et livrent un joli film qui explore plein de sujets de société avec seulement un naufragé et un cadavre. Ce qui est une performance en soi...
Le cadavre, nommé Manny a oublié tout de sa vie d'homme, Hank lui ré-apprend donc patiemment tout avec une poésie sans limite. Utilisant des déchets, tout ce qu'il trouve pour recréer des scènes et des structures connues. Et peu à peu, Hank, l'homme seul et perdu se recrée son univers et se reconnecte avec la vie. L'apprentissage de Manny est parfois légèrement dérangeant à l'image de leur discution sur la masturbation que Manny conclue par "je penserai à ta mère" en pensant bien faire parce qu'il n'a pas tout compris. Et parfois c'est simplement naif et magique, comme la scéance de cinéma. En expliquant à Manny le fonctionnement de la vie en société, Hank ré-apprend lui aussi ce que c'est, ce que ça apporte et se comprend mieux lui-même.
Le scénario est donc suprenant, dérangeant, beau, poétique et un peu débile, dans des proportions qui en font une oeuvre qui parait extraordinaire. Oeuvre soutenue par un casting solide, le duo Dano/Radcliffe fonctionne à merveille, les deux acteurs n'étant pas des débutants. Paul Dano explore le fond de l'âme humaine lorsqu'elle abandonne, avec des expressions qui trahissent une grande douleur, et une solitude extrême. Les émotions passent également lorsque Hank renait grâce à sa curieuse amitié avec un cadavre. Le rôle de Manny est une incroyable performance de Daniel Radciffe qui prouve qu'il peut jouer bien plus qu'un gamin, cador de la magie dans le lycée du coin, en interprétant un maccabée flatulent. Rôle complexe et physiquement peu flatteur, Manny le cadavre est brillamment interprété, touchant son spectateur en plein coeur par sa naiveté innocente tout comme il déclenche des éclats de rire lorsqu'il est utilisé comme fontaine ou comme grapin. Là se trouve d'ailleurs l'explication du titre qui est en fait un jeu de mot qui n'a pas été traduit : Manny n'est pas suisse. Manny est l'équivalent humain du couteau suisse, servant à tout faire, qui se dit Swiss Army Knife en anglais. Et vous verrez que les scénaristes ont poussé très loin l'équivalence, Manny est véritablement un couteau suisse humain !!
Le scénario atypique et le duo d'acteurs efficaces sont accompagnés d'un réalisation travaillée. Les plans de nature, les lumières, le petit monde de Hank et son cadavre dans la forêt, tout accentue le coté magique du film. Les plans larges dans la natures donne ce sentiment de solitude que vit Hank et les plans plus rapprochés avec Manny ont cette lumière chaleureuse qui réchauffe à la fois le coeur de Hank et celui du spectateur. Un très joli jeu de couleurs et de lumière pour un chouette mélange d'émotions !
La fin du film, à mes yeux apporte plus de questions que de réponses et surtout brise un peu la magie que le film avait construit petit à petit. Une sorte de retour sur terre un peu brutal pour le spectateur qui du coup se sent un peu floué sur la fin. Fin que personnellement je n'ai pas bien compris, et qui peut, je pense supporter plusieurs interprétations. A vous d'imaginer la votre donc !!
En bref, un OVNI parlant de la dé-socialisation d'un homme qui reprendra goût à la vie en se liant d'amitié avec un cadavre pétomane. Une plongée dans l'âme humaine, surfant sur des blagues de prout, un scénario improbable qui sur le papier à l'air d'être une grosse farce, mais qui fonctionne bien. Un film à voir au moins une fois dans sa vie, ne serait-ce que pour entendre l'interprétation de la musique de Jurassic Park par un macchabée...
Il est a noter que la BO est quasi intégralement chantée par les acteurs et créée pour le film, parfaitement adaptée à chaque scène elle participe énormément à l'ambiance un peu magique du film. Vous n'écouterez plus jamais la BO de Jurassic Park de la même manière !!! (c'est la 11 de la playlist)