[Cinéma] Le film de la semaine #6
Le film de la semaine
Pour cette nouvelle semaine, départ pour l'Amérique du nord avec une collaboration USA/Canada. Victimes de mal de mer s'abstenir, le film se passe intégralement en plein océan. Mais trêve de bavardage, place au film de cette semaine, nous parlerons donc de vieil homme et de la mer dans...
____________________________________________
All is Lost
Année : 2013 - Pays : USA/Canada - Durée : 106 mn - Réalisation et Scénario : J. C. Chandor - Casting : Robert Redford
~ Bande annonce ~
~ Disponibilité : Netflix - DVD ~
Un homme face à l'océan.
Après le choc de son voilier avec un container, un marin solitaire va devoir survivre face aux élements et au destin. Son naufrage va durer 8 jours...
DU SURVIVAL !!! Mon thème quasi favori de toute la vie, et l'océan qui est également un environnement que j'affectionne. Ajoutez à cela un unique acteur, que dis-je une légende, Robert Redford et aucun dialogue. Et voilà. Ca a l'air nul hein, mais je raconte pas bien ! En vrai ça m'a plu, même si en effet, le rythme est un peu spécial, dans le genre contemplatif par moment et bien tendu parfois... Je me plaignais un peu du rythme de Nigh Watch et de ses intrigues annexes brouillonnes, alors que là... pas de soucis. Un bateau, un océan, un acteur : un film.
Mais la vraie spécificité de ce film, c'est cet acteur unique. Le film débute alors qu'il est déjà en mer, nous n'avons donc aucune réelle info sur ce personnage. Qui est-il ? A-t'il une famille qui l'attend ? Que fait-il sur l'eau, où va-t'il ? Autant de questions qui sont sans réponse. Le risque est un manque d'attachement au personnage, sans background la plupart des personnages de fiction apparaissent fades et sans interêt, alors quelle prise de risque dans l'écriture de ce marin ! Mais curieusement, je me suis prise très rapidement au jeu, et sans rien savoir de cet homme, ni son nom, ni son âge, ni son but, j'ai ressenti comme lui la violence des élements.
Ce film peut être perçu comme un parallèle à la vie, le parcours de ce marin peu être celui de n'importe qui, une chouette vie qui vogue sur les flots du destin... l'accident puis ce combat pour survivre à tout prix. D'ailleurs, ce personnage n'est pas démuni face aux avaries, c'est un marin aggueri qui peut réparer un trou dans sa coque, mais une réparation sera toujours une faiblesse face aux nouveaux obstacles... L'homme sans nom sait comment réparer, il sait aussi se servir de ses cartes, il sait analyser que sa radio est défectueuse. Mais il ne sait pas respirer sous l'eau et il ne sait pas contrôler les élements... Cet homme sans nom, n'apparait pas comme un nigaud, mais ce n'est pas non plus un héros, c'est simplement un humain face à la nature, face à son destin.
L'absence de dialogue et la musique extrêmement discrète accentuent grandement le coté réaliste du film. Pas que les gens qui parlent tout seuls me dérangent, j'ai même tendance à le faire dans certaines conditions, mais il faut avouer que dans les situations du films, et bien je trouve normal de ne pas s'auto-raconter ses pensées à voix haute. Même si c'est parfois pratique au niveau scénaristique, je pense que ça serait en trop dans ce film dont la beauté réside justement dans ce silence. Parfois les plus grands combats, les plus belles victoires ou les plus cruelles défaites se font sans aucun bruit.
En plus d'un scénario silencieux, mais ultra efficace, le film bénéficie d'une réalisation à la hauteur. Sobre, mais très belle, on y retrouve l'océan dans tous ses états et moi j'aime l'océan, tous les océans. La mer est belle, même en furie et l'essentiel du film c'est la mer, c'est même finalement le deuxième personnage principal du film. Les deux acteurs du film sont talentueux, Robert Redford campe un homme perdu, qui lutte en silence jusqu'à la dernière seconde du film. Vraiment très crédible dans son personnage, il lui donne vie grâce à ce calme apparent, tout en nuances et en retenue. L'espace, maritime donne lieu à une réalisation intime, la caméra étant toujours proche de son acteur que ce soit dans le bateau ou le radeau de survie si bien que peu à peu le spectateur est embarqué lui aussi. Sans rien pour ancrer son personnage dans une réalité, le spectateur devient lui-même l'homme sans nom et c'est alors lui qui est frappé par les eléments déchainés...
Un joli tour de force qui évite astucieusement les codes narratifs classiques pour offrir à son public un film sobre mais émotionnellement puissant. L'aventure d'un homme ordinaire face au plus grand des deséspoirs, voguant doucement vers sa probable mort. Un acteur juste et une absence de dialogues qui laisse une grande place à l'imaginaire du spectateur, une manière très originale de rendre un personnage attachant. Vous l'aurez compris, j'ai beaucoup aimé ce film, à la fois beau, terrifiant et douloureux, sans jamais, jamais s'aventurer sur le terrain du melodrame et du larmoyant. Cette sobriété dans l'absence d'espoir est magnifique et Robert Redford malgré ses 77 ans, y est excellent.