[Manga] Poison city
Poison City
Titre original : Yuugai Toshi / 有害都市
Auteur : Tsutsui Tetsuya
Année : 2014 (VF : 2015)
Comme je n'avais pas accès aux informations jusqu'à présent, j'ignorais tout des terrifiants changements qui s'étaient produits à l'extérieur. À moins que j'aie juste fait semblant de ne rien remarquer. Les signes annonciateurs étaient déjà là. Le temps que je prenne réellement conscience de la situation, il était trop tard. Le monde ne serait plus jamais le même.
Mon avis
J'ai acheté le manga un peu par défaut, si on peut dire ça comme ça. En effet, je cherchais Manhole, du même auteur parce que je lis vos commentaires et parfois je suis vos recommandations. Et après avoir été cruellement déçue par un drama du nom de Manhole, le manga -qui n'a rien a voir- m'a été conseillé. En bref, il n'était pas dans la librairie, mais celui-ci attendait patiemment sur l'étagère. Alors je l'ai acheté. Et je l'ai lu.
Me fiant uniquement à la couverture et au commentaire de la vendeuse qui y avait collé un post-it affirmant que c'était bien, je m'attendais à suivre une histoire de survie dans un monde dévasté... Quelle erreur ! Bon je ne lis pas plus les résumés de livres que les synopsis de dramas donc, ça ne m'a pas vraiment surpris de me planter comme ça. Il s'agit en fait d'une histoire de mangaka dans un Japon pas tellement lointain, pas du tout dévasté mais sujet à une censure féroce. On aborde doucement le délicat sujet de la liberté d'expression, et certaines scènes n'étaient pas sans rappeler l'excellent Farenheit 451 de Ray Bradbury et ses bûchers de livres...
Les personnages, sans être originaux ni spécialement attachants, sont efficaces. Mikio Hibino, notre jeune mangaka est idéaliste et surtout ne veut pas faire de compromis dans son oeuvre. Mais il veut aussi manger un peu... Au-delà de la censure extrême dans le cadre de Poison City, l'auteur nous permet d'entrevoir le travail énorme demandé aux artistes et la pression exercée sur ceux-ci s'ils veulent vendre. Les compromis ne sont pas, je pense, propres à un climat de censure extrême et il doit être bien difficile de conserver une totale liberté d'expression tout en assurant un niveau de vie correct. L'histoire de Mikio et de son manga controversé, montre également le climat de désespoir qui peut envahir un mangaka dont l'œuvre se voit qualifiée de "nocive", tuant par là sa création artistique et la possibilité de pouvoir manger à sa faim...
Le manga qu'il dessine sera d'ailleurs régulièrement inséré dans le récit. comme pour nous montrer ce que dont la censure peut nous priver. Assorti des arguments discutables des défenseurs de la morale c'est une sorte de dénonciation de ce qu'a vécu l'auteur lui-même. Alors je ne le savais pas, bien entendu, avant de lire Poison City, mais c'est assez bien expliqué dedans. Manhole, le précédent manga de Tetsuya a réellement été déclaré "ouvrage nocif" dans la préfecture de Nagasaki et parle d'un probable "virus", étrangement comme le manga du jeune Mikio Hibino...
On suit donc d'un côté Mikio dans les méandres éditoriales et l'histoire de son manga. Et c'est assez malin car la sympathie qu'inspire ses héros est brutalement opposée à la censure exagérée. Nous en montrer un peu pour mieux nous priver du reste, c'était une excellente idée pour faire réfléchir le lecteur. Le jeune Mikio sera confronté à de nombreuses difficultés et aura également à plusieurs reprises la possibilité de plaire (ou plutôt de "moins déplaire") à la censure. Entre truc et astuces, compromis et réécriture de son histoire, il sera même confronté à un éditeur américain ce qui donnera lieu à une (peu) subtile comparaison avec la vague de censure anti-comics qui eut lieu outre Atlantique dans les années 50. Ce petit point historique vient appuyer sur le côté réaliste de Poison City, en liant cette fiction à des évènements passés bien réels.
Quoi qu'il en soit, c'est un manga d'un style que je n'avais pas l'habitude de lire, moi je me suis arrêtée à Bleach et Hunter X Hunter pour vous donner une idée... Mais dans un sens, ça m'a bien plu, même si ce n'est pas aussi "détendant" que les deux précédemment cités.